22-04-2008
René Char (1907-1988) : Biens égaux
Je suis épris de ce morceau tendre de campagne, de son accoudoir de solitude au
bord duquel les orages viennent se dénouer avec docilité, au mât duquel un
visage perdu, par instant s’éclaire et me regagne. De si loin que je me
souvienne, je me distingue penché sur les végétaux du jardin désordonné de mon
père, attentif aux sèves, baisant des yeux formes et couleurs que le vent
semi-nocturne irriguait mieux que le main infirme des hommes. Prestige
d’un retour qu’aucune fortune n’offusque. Tribunaux de midi, je
veille. Moi qui jouis du privilège de sentir tout ensemble accablement et
confiance, défection et courage, je n’ai retenu personne sinon l’angle fusant
d’une Rencontre.
Sur une route de lavande et de vin, nous avons marché côte à côte dans un cadre
enfantin de poussière à gosier de ronces, l’un se sachant aimé de
l’autre. Ce n’est pas un homme à tête de fable que plus tard tu baisait
derrière les brumes de ton lit constant. Te voici nue et entre toutes la
meilleure seulement aujourd’hui où tu franchis la sortie d’un hymne
raboteux. L’espace pour toujours est-il cet absolu et scintillant congé,
chétive volte-face? Mais prédisant cela j’affirme que tu vis; le
sillon s’éclaire entre ton bien et mon mal. La chaleur reviendra avec le
silence comme je te soulèverai, Inanimée.
Publié par Jean dans Vacuité | RSS 2.0
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